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09 avril

L'invité du week-end : Le photographe Luc Olivier...


Le photographe Luc Olivier est notre invité ce week-end. Il nous parle de sa passion, de son parcours professionnel, des reportages qu'il a eu le plus de plaisir à réaliser en France et à l'étranger, des scènes dont il a été le témoin, mais aussi du personnage qui se cache derrière l'objectif...

 

Haute-Loire Infos : Votre univers est celui de la photo, comment avez-vous plongé dedans. Sans jeu de mot, quel a été le déclic ?

 

Luc Olivier : Après le lycée, j’ai fait une première formation dans l’imprimerie à Saint-Etienne puis un photographe publicitaire m’a proposé un apprentissage  au cours duquel j’ai alterné la pratique dans son atelier et les cours à Lyon. C’est vraiment cette formation à la fois pratique et théorique qui a été déterminante dans mon parcours. »

 

Haute-Loire Infos : Vous êtes à l’origine de nombreux reportages photos en France et à l’étranger. Dans un cas comme dans l’autre, quels sont ceux à travers lesquels vous avez pris le plus de plaisir ?

 

Luc Olivier : Les sujets les plus intéressants sont ceux qui permettent de vivre des situations historiques, des bouleversements, des révolutions, de connaître d’autres réalités. On ne peut évidemment pas parler de plaisir, mais plutôt  de coup de cœur pour un pays, un peuple, dans une situation donnée. J’ai toujours une nostalgie de la révolution sandiniste au Nicaragua, de ces paysans qui investissaient les terres confisquées par le dictateur, des écoles, des centres de santé qui ouvraient un peu partout, des campagnes d’alphabétisation, de l’adhésion de la population à un nouveau projet. La révolution de 1989 en Roumanie a été aussi un moment marquant avec la terrible découverte des mouroirs où étaient dirigés les handicapés mentaux.

J’ai malheureusement rencontré d’autres situations de ce type ailleurs, notamment dans les prisons de Madagascar du temps du régime de Ratsiraka. Mais le pays que j’ai préféré, où je suis allé le plus souvent et où je retournerai, c’est incontestablement la Géorgie, c’est presque une seconde patrie. J’ai vraiment apprécié que la France ait aidé la Géorgie de manière aussi déterminante lors de la guerre de 2008. Pour revenir à la notion de plaisir évoquée dans la question, alors là, pas de doute, c’est en Haute-Loire que je me régale !

 

Haute-Loire Infos : Quels sont les magazines pour lesquels vous avez travaillé, et qu’est-ce que cela vous a apporté ?

 

Luc Olivier : J’ai collaboré avec l’agence Gamma qui a vendu mes reportages à de nombreux magazines dans le monde entier, j’ai aussi travaillé pendant plusieurs années à la revue « Carnets de Voyage » pour laquelle j’ai réalisé des reportages dans plusieurs pays. J’ai également aimé bosser pour le magazine de la Fédération Française de Rugby pour qui je suivais les équipes de France en tournée. Un jour, j’ai retrouvé au Chili Hervé Brive, un ponot qui accueillait là-bas l’équipe de France junior pour une coupe du monde ; le staff n’en revenait pas, ils nous ont dit : « Les gars du Puy, vous êtes une vraie mafia ! ». Une fois aussi à Macao, j’ai rencontré une étudiante chinoise qui avait fait le carnaval du Puy et, en Argentine, un aveyronnais dont le père avait tenu la ferme du Sauvage ! Cela répond à la fin de la question, voilà ce que cela m’a apporté : des rencontres, des amitiés et la conscience que le monde est petit.

 

Haute-Loire Infos : Pourquoi avez-vous décidé de publiez vos propres livres, et quels sont vos projets ?

 

Luc Olivier : Pour faire un peu autre chose. Quand on se pose la question de ce que cela veut dire d’être photographe, de faire des images aujourd’hui, on répond fatalement : « pas grand chose » . C’est tellement plus formidable et plus essentiel d’être médecin, chirurgien, policier, avocat, pompier… de sauver des gens, de leur porter secours. Aujourd’hui, des images, il y en a beaucoup trop, je dirai même qu’il est nocif d’en faire plus. J’essaie donc d’en faire moins et de les intégrer à des projets positifs, qui, s’ils ne se révèlent pas fondamentalement utiles, peuvent apporter un peu d’agrément. J’ai eu ainsi des retours très positifs sur le livre « La Haute-Loire à hauteur d’homme », les gens ont aimé l’approche humaine et culturelle de leur territoire qui est proposée par les auteurs de cet ouvrage. En ce moment, je termine un livre de cuisine avec les Toques d’Auvergne et le professeur Igor Tauveron, diabétologue au CHU de Clermont-Ferrand, il y sera question de bonne cuisine bien sûr, mais aussi de santé et d’équilibre. Une approche qui va devenir incontournable. Et puis, le gros chantier en cours qui va s’achever, c’est le livre sur Le Puy prévu pour la rentrée. Beaucoup de photos, mais aussi beaucoup de textes, un vrai livre d’art, comme on en fait sur Florence ou Venise !

 

Haute-Loire Infos : Quels conseils donneriez-vous à un débutant qui veut se lancer dans la photo ?

 

Luc Olivier : Avant tout d’apprendre le métier. C’est incontournable. On ne sera jamais un bon professionnel si l’on a pas au départ une solide formation, apprentissage ou école. C’est d’ailleurs la même chose pour tous les métiers. Imaginez-vous ouvrir une pâtisserie parce que vous savez faire quelques petits gâteaux que votre famille trouve réussis ?

 

Haute-Loire Infos : Quel est le secret d’une photo réussie ?

 

Luc Olivier : Tout est dans le mot « réussi ». Cela ne suffit pas, tout le monde peut réussir une photo de paysage, comme on peut réussir une bonne pizza jambon-fromage!

Pour un professionnel, une bonne photo, c’est celle qui convient à son client. S’il l’achète c’est que vous avez fait du bon boulot. Comme dans tous les métiers, la reconnaissance est avant tout financière. Je sais bien que c’est un peu « provoc » de dire cela pour une activité qui revendique parfois (à mon avis à tort) une dimension « artistique ». Mais si vous attendez que le monde entier vous admire parce que vous avez photographié un beau lever de soleil avec de la brume, vous allez être forcément déçu…

 

Haute-Loire Infos : Parlons à présent de la personne qui se cache derrière l’objectif ?

 

Luc Olivier : Ah, ah, comme ça on se cache derrière un objectif… Timide, peut-être ? Oui, sans doute, mais je me soigne. De cela et du reste, pour essayer d’améliorer ce qui peut l’être. Ne comptez pas sur moi pour vous révéler toutes mes turpitudes, mais tous ceux qui en parlent ont raison.

 

Haute-Loire Infos : En dehors de la photo, comment occupez vous vos moments de libre ?

 

Luc Olivier : Tout d’abord, le travail ne me fait pas peur, j’ai grandi dans une famille ouvrière où le travail était une valeur essentielle pour l’individu et pour la collectivité. Pour moi, le travail c’est aussi la liberté et donc je me sens dans un moment libre quand je travaille. Vous aurez compris qu’en cumulant les activités de photographe et d’éditeur, les moments de « non-travail » sont rares. Je les réserve à mon épouse, qui, ça tombe bien, me réserve aussi les siens. J’aime cuisiner (c’était le métier que je voulais faire enfant), faire le marché du samedi, passer du temps avec les amis autour d’une bonne table. Je préfère la lecture que le cinoche. Je suis toujours passionné par le rugby que j’ai pratiqué pendant 30 ans, je n’ai jamais été un bon joueur, (pas assez épais, pas assez guerrier), mais ça me plaisait. Mes titres de gloire sont d’avoir joué quelques matches avec mon père, et avec mes copains Jo Suc à Lavoûte et Jean-Louis Rocher à Espaly.

 

Haute-Loire Infos : Quel est votre regard sur le monde actuel, hors objectif ?

 

Luc Olivier : Je n’ai pas opté pour un « prêt-à-penser » avec une adhésion à un camp politique, je m’autorise donc des opinions souvent en « décalage », ce qui fait certainement de moi un « réac » aux yeux de quelques-uns de mes amis. Je ne pense pas que l’on puisse traverser la vie avec « l’indignation » en guise de pensée, mais si je ne devais désigner qu’un seul de mes sujets d’inquiétude, je citerai le sort réservé aux femmes. Malheureusement, ça ne s’arrange pas et on voit bien que, même chez nous, on est en régression. On ne pourra se prétendre civilisés tant que, partout, y compris ici, la moitié de l’humanité ne laissera pas toute sa place et toute sa liberté à l’autre moitié.

 

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